La filière bois fait filière

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Fordaq JT
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L'an dernier, le Plan Ambition Bois tentait de convaincre les autorités quant  la volonté de la filière bois de répondre aux attentes de la RT2022 appelée RE2020. On était dans la situation de défendre la prise en compte du carbone biogénique. Un an après, par l'entremise de FBF et FBIE, la filière bois présente un Manifeste à l'attention des candidats de l'élection présidentielle de 2022. Une sortie un peu abrupte et qui ne découle pas, apparemment, d'une concertation systématique de toutes les nombreuses fédérations de la filière. Comme on est à 2 mois et demi des élections, cette prise de position obligée tardait à venir, même si tous les candidats ne sont pas encore désignés et parrainés. De même que le Plan Ambition Bois s'est muée en cours de route en pendant des ambitions à l'horizon de 2030 (voir le Plan 2030 de Macron), l'exercice obligé est devenu pour ses présentateurs, Jean-Michel Servant de FBF et Frédéric Carteret de FBIE, un exercice inédit de synthèse de proposition, à une encablure des résultats des Assises de la forêt et du bois dont les conclusions dépassent la filière bois comme telle puisque les débats sont menées en partenariat avec les politiques et que l'association Canopée, par exemple, est présente sur les quatre axes de travail.

Ce manifeste, c'est un peu un portrait de maître, le visage tourné vers la droite (souveraineté nationale) et les yeux vers la gauche (écologie et crise du climat). Pour ceux qui le regarde, de quelque côté qu'ils se situent, l'artiste a fait en sorte qu'ils se sente visés. Quel artiste ? Le manifeste n'a pas été confié à une boîte de comm. Les présidents de FBF et FBIE sont des professionnels du bois et même si Carteret encense Servant comme professeur, on peut estimer qu'il s'agit d'un travail collectif, auquel s'ajoute la présentation très réussie, notamment par l'existence du replay sur You Tube. Sur les 90 minutes de la présentation, le replay ne tronque aucune des questions de journalistes qui s'égrènent sur une trentaine de minutes. C'est aussi l'occasion d'entendre les autres personnalités présentes à la table, dont Fabrice Denis, directeur Général du pôle Construire Autrement de Bouygues Construction, une présence inédite aux côtés de responsables élus de la filière comme Luc Charmasson (CSF), Jacques Ducerf (FNB), Dominique Jarlier (Communes Forestières), Paul Jarquin (FIBois France) et Dominique Weber (Ameublement).

La présentation des 4 axes et 23 propositions du Manifeste occupait la partie centrale, après une longue introduction technique et scientifique de Jean-Michel Servant et un rappel du Plan Ambition Bois par Frédéric Carteret, et de l'enquête sur la perception du bois dont les résultats sont tellement élogieux qu'on en oublie presque le ressentiment contre la coupe des arbres ancré dans une partie de la population. On se dit que peut-être cette frange est de l'ordre des antivax, bruyante mais largement minoritaire.

France Bois Industries Entreprises et France Bois Forêt ont répertorié dans ce Manifeste 23 mesures à prendre pour accompagner le développement de la filière en France pour qu’elle participe activement à la décarbonation de l’économie et à la souveraineté du pays.

Ces propositions sont structurées autour de 4 grands objectifs :

  1. Développer tous les usages du bois et les capacités industrielles françaises pour répondre à la hausse de la demande.
  2. Adapter les forêts sur le long terme pour conserver la biodiversité et préserver la multifonctionnalité des peuplements forestiers.
  3. Renforcer l’attractivité des métiers de la filière et développer les compétences pour pourvoir les emplois d’aujourd’hui et de demain.
  4. Rapprocher les citoyens de la forêt et de la filière Forêt-Bois.

Cette nouvelle véritable présentation publique de la filière bois française dera dae à plus d'un titre. Premièrement, Jean-Michel Servant lance la théorie du vélo, soit l'imbrication de deux cycles complémentaires du carbone, l'un au niveau de l'arbre, l'autre au niveau de la transformation. Ce vélo, selon les présentateurs, compense 20 à 25% des émissions humaines de GES en France. La situation n'a donc pas changé depuis 2012 quand la filière demandait une retribution pour cette contribution. Si ce n'est qu'elle se montre plus prudente. Il n'y a pas de revendication-phare et médiatique, les 4 axes et 27 propositions, sans doute tous les candidats vont y souscrire (ce qu'on va voir dans les jours qui viennent). Il est tout de même question de 150 millions d'euros (par an ?) pour accompagner l'adaptation de la forêt au changement climatique.

Second aspect tranchant. Jamais la filière ne s'est présentée aussi attentive au cataclysme climatique en cours. L'exercice "inédit" est de replacer ces craintes environnementales dans un cadre volontaire de réindustrialisation de la filière bois française. Cette filière, cette outil de souveraineté nationale, est aussi la meilleure façon de diminuer les émissions humaines françaises. Les forestiers ont besoin d'argent, les transformateurs se trouvent confortés par leur envie d'industrialisation et les constructeurs peuvent choisir des matériaux biosourcés en circuit court. Exemple, l'engagement de Bouygues conduit Piveteau à commander une seconde ligne de CLT.

Troisième point : il n'y a pas de torsion écologique comme dans certains communiqués de filière du passé. La réindustrialisation est affirmée dans son caractère écologique et émissif tout en établissant bien le primat de biodiversité de la forêt qui regroupe 80% de cette biodiversité. Un effort pédagogique assumé. L'Europe pourrait s'inspirer de la démarche, dirait-on.

Enfin, la filière existe comme l'a confirmé le fonctionnement de la task force sur les approvisionnement qui a fait remonter les informations de l'aval vers l'amont. Les contacts avec six ONG internationales (mais pas Canopée) sont établis et pérennisés, pas seulement M. Le Bouher. Bref, les six organisations qui font la pluie et le beau temps au niveau européen, et poussent chaque fois la représentation européenne de la filière bois dans ses retranchements.

On ne sait pas trop ce qui s'est passé mais soudain la filière bois se montre sous un autre jour, la langue de bois cède, le travail de structuration engagé depuis dix ans va porter ses fruits. Quel et le candidat qui saura se montrer à la hauteur de ce manifeste ? Certes, les 27 propositions sont assez consensuelles et en soi étouffe-chrétien. Mais la balle de médiatisation est dans le camp des candidats, pas de la filière. Les équipes doivent se positionner, ou non. Si elles ne le font pas, elles perdent leur crédit. Si elles le font, elles se penchent alors sur ce domaine écolo-industriel moins menteur que le nucléaire. A la réponse des candidats ont pourra juger de leur valeur ou de leur inanité. La filière bois est une filière clef de la transition environnementale, elle parle ici pour elle-même et pas pour tout le monde biosourcé, c'est son choix de sérieux même si le monde biosourcé demanderait aussi un porte-parole et que la filière bois n'a pas encore franchi ce pas.

Le duo Servant Carteret demande à être utilisé souvent. Les autres participants également de très bonne tenue, justifiant ainsi leur raison d'être là. Pas de couac, en tout cas rien qui ait permis aux journalistes de rentrer dans la brèche. Et on arrive à des affirmations comme "la filière bois à l'aube de sa consécration". Quelle différence avec la présentations d'un passé récent. A plusieurs reprises, on entend parler d'union sacrée, union sacrée de la filière face au réchauffement climatique, ou union sacrée pour défendre la matière forestière française, qu'importe ? Union sacrée face à l'ennemi chinois ou l'ennemi climatique ? Choisissez ce que vous préférez, mais union en tout cas. C'est de fait ce que voulait le gouvernement pour distribuer une rallonge de 100 millions d'euros promise fin juillet après le Forum Bois Construction. Sauf que cette fois, on a bien l'impression que la filière ne fait pas son show, elle a trouvé, avec le vélo de Servant, une sorte de formule.  

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